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A propos d'Obligement
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David Brunet
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Entrevue avec Stéphane Anquetil
(Entrevue réalisée par Frédéric Letellier-Cohen et extraite de Abandonware Magazines - janvier 2009)
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Le magazine Amiga Dream faisait des heureux chez les amigaïstes francophones dans les années 1990. Voici une entrevue
avec Stéphane Anquetil, ancien rédacteur dans cette revue Amiga.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m'appelle Stéphane Anquetil et je suis un ancien pigiste de la revue Amiga Dream et un ancien fervent amigaïste.
Aujourd'hui, je suis un des fondateurs de 3D Weave, qui est une des premières agences d'illustration 3D de Paris.
Pouvez-vous présenter la
revue Amiga Dream ?
Alors, je suis mal positionné pour commenter le journal, vu que je suis arrivé par hasard pour remplacer une personne
qui n'avait plus le temps d'écrire pour la rubrique "Domaine Public". Une section importante du magazine
(de 3 à 5 pages) qui équivaudrait aujourd'hui à la partie "Download".
Ce que je retiens, c'est qu'à l'époque, Amiga Dream était le premier magazine Amiga avec une mise en page en
couleur, une maquette professionnelle et pas mal d'illustrations délirantes (la Dreamette). Loin de moi l'idée
de dévaloriser les autres magazines Amiga de l'époque, qui avaient aussi leurs qualités et leurs défauts,
mais Amiga Dream a été le premier mensuel qui avait une qualité professionnelle je dirai.
Quelle était l'ambiance
au sein du magazine ?
Je n'étais pas sur Paris, j'écrivais depuis ma Normandie natale. Pour l'anecdote, je recevais des disquettes qu'on
m'envoyait ou je recevais des programmes de lecteurs. Je testais le maximum par pure passion, et je gardais le
meilleur pour ma rubrique. Je livrais des captures d'écrans en IFF et mes articles en .txt sur disquettes que
je postais ensuite. Je me rappelle de courses mémorables en vélo avec mon colis de disquettes pour parvenir à
temps à la Poste avant la levée afin que ça arrive à Paris avant le bouclage ! Il y avait une descente en
faux-plat de 4 km, mon vélo de course s'en souvient encore.
A l'époque, on transitait tout par disquettes, les disques durs portables n'existait pas en dehors des coûteux
SyQuest SCSI et mon modem n'était qu'un 14 400 bds ! Internet n'était pas accessible au public ni aux
petites entreprises. A la rigueur, on pouvait se connecter sur des BBS comme Ramses qui proposait un accès à
Fidonet et un courrier électronique. J'avais des factures de téléphone de 1800 FF tous les deux mois, ma mère râlait !
Avez-vous
encore des contacts avec vos anciens collègues de l'époque ?
J'ai encore des contacts avec Romain Canonge, qui a depuis créé une agence d'édition : AdTatum.
Il m'arrive souvent via mon travail ou Internet que les gens parlent de l'Amiga ou racontent leurs débuts
en informatique avec. C'est plus qu'une machine, c'est un vrai état d'esprit qui a marqué profondément
des tas de jeunes qui sont devenus depuis programmeurs, développeurs, concepteurs Web, graphistes, etc.
Est-ce que vous
vous intéressez toujours à la presse informatique et si oui, quelles sont les revues que vous appréciez ?
Comme beaucoup, je suis passé sur PC - je n'ai jamais pu supporter les Mac et leur esprit faussement élitiste,
et puis la souris à un bouton, ce n'était pas mon truc. C'est vrai que la fin de la génération d'ordinateurs
dit 32 bits comme l'Amiga et l'Atari ST a aussi sonné le glas d'une certaine façon de faire de l'informatique :
créer soi-même, comprendre comment fonctionne le système, le bidouiller, personnaliser à fond son système.
Même la façon de dessiner a changé, d'un mode palette sous Deluxe Paint ou autre, on passait à PhotoShop
et 16 millions de couleurs facilement. L'état d'esprit a complètement changé. On est passé d'un marché de passionnés
à un marché de masse.
Aujourd'hui, je n'achète que deux magazines, Canard PC, qui est sans doute le seul journal PC indépendant, avec
un vrai état d'esprit (d'ailleurs il y a des vieux trentenaires comme moi dedans). Canard PC parle notamment
de la scène de jeu indépendante.
J'aime bien aussi ChronicArt qui ne parle pas que d'informatique et de jeu vidéo, dont la lecture est aride
(ils aiment bien s'auto-référencer, se la jouer gros intellos) mais qui déniche des BD, musiques, DVD autre
que la grosse purée "grand public".
Je crois que l'Amiga et l'Atari ont engendré des utilisateurs "qui n'aiment pas faire comme tout le monde" ;^)
Avez-vous encore un
Amiga et vous arrive-t-il de l'utiliser ?
Oui, je n'ai jamais pu me résoudre m'en séparer ! J'ai donc encore mon premier Amiga 2000 dopé,
qui encombre mon salon. Un des disques durs est HS mais il marche encore (il a même fallu le remettre à
l'heure pour 2008). Il tourne sous Workbench 2.1, dispose d'un processeur 68020 avec 2 Mo de mémoire Fast,
deux lecteurs de disquette et deux disques durs. J'ai essayé de mettre mes enfants dessus, mais
ils sont encore trop jeunes. C'est la misère pour reprendre des fichiers dessus ! Pas d'USB, pas
de graveur de CD, plus de PC en port série pour faire du Null Modem avec. Si quelqu'un a une solution, help !
Enfin, il y a un Amiga 1200 étendu avec un 68030, de l'IDE, 4 Mo de mémoire et monté en tour avec lecteur
de disquette PC HD par DeltaGraph'X qui occupe encore un placard chez mes parents ! J'ai eu aussi un
A1200 classique mais que j'ai revendu à l'époque.
Que vous a apporté
l'Amiga dans votre travail ?
L'Amiga était assez polyvalent pour qu'on touche à tout. Ce que j'ai appris à l'époque en dessinant des icônes
au pixel près me sert encore aujourd'hui. Et puis c'est grâce à ma connaissance de Scala
que j'ai pu décrocher mon premier travail en tant qu'infographiste en Bretagne.
Qu'elles idées étaient
présentes sur l'Amiga qui mériteraient d'être reprises aujourd'hui ?
Je regrette qu'aujourd'hui on résume l'histoire de l'informatique à l'apparition de l'Apple II, du premier Mac
et de Windows sur PC. C'est complètement faux. L'Amiga avait plein de bonnes idées et le milieu très actif
des développeurs permettait de personnaliser le système dans des proportions impossibles aujourd'hui. Je retiens
encore les datatypes et l'idée du multi-écran.
Le multi-écran en multitâche, c'était vraiment la possibilité de changer de résolution selon les applications
et de basculer entre elles à la vitesse de l'éclair. Surtout pouvoir baisser la barre de menu en haut pour voir
le programme en dessous malgré des interfaces de résolutions différentes, c'était génial ! Les interfaces à
base de fenêtres sont complètement idiotes, on passe son temps à repositionner les palettes et les fenêtres !
Et puis je ne voudrais pas dire, mais on avait un système complet qui tournait avec 1 Mo de mémoire,
alors de qui se moque-t-on ?
Quant aux datatypes, c'était la possibilité pour un développeur de faire un import/export compatible avec
toutes les applications, parce que géré par le système. Autrement dit, la fin des incompatibilités. N'importe
quel programme aurait pu lire n'importe quel format plutôt que chacun continue de développer dans son coin
la prise en charge de tel ou tel format.
Que pensez-vous
de la communauté amigaïste française ?
L'actuelle, je n'en pense rien, car je ne la connais pas. A l'époque, il faut souligner que c'était un petit monde,
mais avec des clivages assez importants. Je me rappelle de débats interminables, de véritables enguirlandades !
Ce n'était pas idyllique, chacun voyait l'Amiga d'une certaine façon. Il y avait la guéguerre Amiga-Atari,
puis Amiga vs PC.
Enfin, les amigaïstes étaient divisés par leur configuration matérielle.
D'un côté, ceux qui pouvaient s'acheter un disque dur, des cartes accélératrices, de la mémoire Fast
et qui pouvaient donc découvrir le Workbench et le système en général d'une façon extraordinaire.
Avec un peu de mémoire et un disque dur, l'Amiga devenait l'ordinateur le plus agréable à utiliser du
monde ! De l'autre, ceux qui n'avaient qu'un petit Amiga (500 ou 600) et juste un deuxième lecteur
de disquette. Ça limitait forcément aux jeux et aux démos et à de la programmation très orientée "bidouille".
Du coup, il y avait souvent un monde entre les joueurs, les pirates et les demomakers et de l'autre les
développeurs d'utilitaires ou de produits plus professionnels. Évidemment, ces "frontières"
étaient très perméables, on pouvait tout apprécier sur Amiga.
On pouvait créer de la musique avec Protracker
sur deux disquettes, ou s'essayer au graphisme avec Deluxe Paint, ou à la programmation avec AMOS ou
l'assembleur pour les plus courageux ! Sans compter les premiers programmes de 3D comme Sculpt 3D
ou Imagine. Personnellement, j'avais acheté (très cher) Aladdin 4D, puis je suis passé sous LightWave 3D.
C'est marrant d'en faire son métier des années après.
Mais comme le marché était petit, cela cloisonnait encore plus les débouchés professionnels et les ventes.
Du coup, les sociétés françaises étaient en concurrence et ça bataillait ferme parfois !
D'un autre côté, à cette époque, il suffisait d'être deux ou trois pour sortir un jeu, une démo ou un produit.
Les passionnés se regroupaient en clubs, associations, groupes de démomakers, etc.
Il y avait une activité associative énorme (Buggs, Atacom, Belier Production, Corsair pour ne citer que ceux
que je connaissais). Certains organisaient des salons, des rassemblements démos, etc. Les gens se regroupaient
et s'entassait dans les voitures pour y aller, c'était la bonne époque ! Maintenant, quel salon informatique
fait rêver ?
Quelque chose à ajouter ?
Oui, Dream était un bon magazine qui essayait de véhiculer une image positive, optimiste et professionnelle
de la machine. A relire les pages numérisées sur votre site, je suis surpris de la qualité des articles,
du souci de couvrir plein de domaines différents. Bon évidemment, dans le genre article sur tout, même
le plus obscur programme inconnu, Amiga News était imbattable. Personnellement, Amiga Dream a été mon premier
vrai salaire, en plus sur ma passion, la rédac' et Romain notamment ont toujours été hyper professionnels et
sympas avec moi, j'en garde un excellent souvenir.
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